3.1.3. Le retour au temps de paix
Ce chapitre est destiné à montrer comment les pouvoirs et institutions aussi bien publics que privés se réorganisent au lendemain du conflit et comment ils font face aux principales préoccupations des populations. Pour ce qui est de l'administration du département, les délibérations du Conseil général constituent une source d'information de premier ordre, que ce soient les rapports annuels des différents services placés sous l'autorité du Préfet ou les débats et voeux formulés par les conseillers généraux (sous-séries 1 N pour les délibérations du Conseil général et 2 N pour celles des conseils d'arrondissement). L'étude de ces sources permet également de voir que le contexte économique et social d'immédiat après-guerre pose rapidement la question des priorités des pouvoirs publics et des nécessaires réorganisations de l'administration.
En ce qui concerne la vie politique, elle reprend son cours. Après les élections législatives de 1919, les autres rendez-vous électoraux s'enchaînent jusqu'en janvier 1920 (élections cantonales, municipales et sénatoriales). Pour étudier le paysage politique local, le chercheur se tournera très classiquement aux Archives départementales vers la sous-série 3 M (3 M 331 pour les élections législatives, 3 M 306 et 307 pour les élections sénatoriales, 3 M 372, 373 et 413 pour les élections cantonales) et la série Z (archives des sous-préfectures), dans laquelle il trouvera de nombreux éléments, notamment sur les élections municipales.
En matière d'ordre public, le pouvoir en place réprime de manière forte les mouvements sociaux qui naissent dès 1919. La réglementation, les états nominatifs, la correspondance et les rapports conservés dans les dossiers des sous-séries 10 M (travail) et 4 M (police), dans ceux de la série O (1 O 19 notamment) et dans ceux de la série Z (sous-préfectures) des Archives départementales, permettent d'appréhender les différentes facettes du climat social d'après-guerre : ils montrent la nature et l'ampleur des mouvements sociaux mais aussi les mesures mises en place par les pouvoirs publics dans le domaine de la surveillance politique, de l'organisation des services de police et de gendarmerie, de la surveillance du syndicalisme et des mouvements sociaux, du contrôle des étrangers, des associations, de la surveillance des individus. On consultera également avec profit les périodiques et notamment Le Semeur d'Ille-et-Vilaine, écho des revendications ouvrières. Ainsi est créé en 1921 le corps de la gendarmerie nationale (qui devient « garde républicaine mobile » en 1926). Sur le plan local, dans les dossiers de la chancellerie (fonds de la cour d'appel de Rennes, cotes 1 U 28 et 29) le chercheur trouvera des éléments sur la réorganisation des compagnies de gendarmerie en 1921. Il en trouvera également en sous série 4 N (bâtiments départementaux).
Sur le plan démographique, pour faire face au terrible bilan de la guerre (alourdi considérablement par l'épidémie de grippe espagnole qui frappe le pays en 1918), les pouvoirs publics mettent en place des mesures législatives de protection de la famille et d'encouragement de la natalité. Concernant ce domaine de l'hygiène et de la santé publique, le chercheur consultera les sources issues des fonds de l'administration préfectorale (sous-séries 5 M et 7 M), des fonds communaux et des fonds des hôpitaux (série H-dépôt).
La reconstruction matérielle et le développement économique et social en Ille-et-Vilaine sont amorcés dès la fin des hostilités, dans les années 1918-1920). Le département d'Ille-et-Vilaine, épargné par les destructions, a bénéficié sur le plan économique de conditions plus favorables que les régions dévastées du nord de la France, pour reprendre le cours normal des activités d'avant-guerre. Comment les secteurs de l'agriculture, du commerce, de l'industrie et de la pêche traversent-ils ces années d'après-guerre entre modernisme et activités traditionnelles ? Quelles sont les conséquences majeures et les difficultés créées par la guerre sur la reprise des activités, sur les finances publiques et sur la législation en matière économique et sociale ? Une fois la paix retrouvée, comment s'opère en faveur des régions sinistrées la solidarité intimement liée à la culture de guerre ? Les documents d'archives nous livrent des éléments de réponse et nous éclairent sur cette période. Le retour en temps de paix n'entraîne pas un aplanissement concret des difficultés économiques : le ravitaillement reste très aléatoire, le rationnement perdure et le renchérissement continu de la vie pour certaines catégories de produits se poursuit, entraînant une dégradation du niveau de vie. De la victoire en 1918 à l'après-démobilisation, la vie quotidienne des habitants du département, entièrement mobilisés jusqu'alors par l'effort de guerre, continue de se trouver considérablement bouleversée. Ont été regroupées ici pour l'essentiel des notices en rapport avec les principaux champs de l'économie locale afin de mettre en évidence les répercussions de la guerre sur la réadaptation de l'économie et les nécessités de reconstruction du territoire. L'enseignement agricole et technique, les conditions de vie des habitants sont parmi les sujets évoqués.
Les principaux producteurs de documents sont la préfecture, les services de l'Etat, les organismes du Conseil général d'Ille-et-Vilaine (par exemple, l'Office départemental agricole), les chambres de commerce (Fougères, Rennes et Saint-Malo), et dans une moindre mesure les succursales de la Banque de France, les établissements d'enseignement comme l'Ecole nationale d'agriculture de Rennes et enfin les communes selon les sujets mentionnés.
En raison des limites chronologiques fixées pour ce guide, certaines prémisses des évolutions économiques et législatives durant l'entre deux guerre ne peuvent être évoquées que succinctement. Pour les années postérieures à 1921, le lecteur devra donc poursuivre ses recherches à partir des répertoires.